mercredi 15 octobre 2008

Livre La science confrontée à l'inexpliqué

Un nouveau livre important :

La science confrontée à l'inexpliqué

De Colm A. Kelleher et George Knapp

(Le Mercure Dauphinois, octobre 2008. Traduction en français du livre Hunt for the Skinwalker, Pocket Books, 2005)

Ce livre de Colm Kelleher et George Knapp plonge le lecteur dans un dossier complexe et fascinant. Même pour ceux qui sont déjà familiarisés avec le « dossier ovni » et ses plus étranges ramifications, il a de quoi en dérouter plus d'un, tellement il accumule d'aspects « à haute étrangeté », qui ont été observés pendant huit ans sur un ranch de l'Utah par une équipe scientifique du groupe NIDS (National Institute for Discovery Science). Certains sont déjà assez connus. Ce sont par exemple des boules lumineuses de diverses couleurs, des objets volants changeant de forme et de dimensions, des apparitions et disparitions soudaines d'entités inquiétantes, et même des mutilations animales, souvent liées, quoi qu'on en dise, à des apparitions d'ovnis. Mais ce livre va plus loin encore, en rapportant des phénomènes « paranormaux », ou « parapsychiques », qui semblent sortir du cadre connu de l'ufologie. Un aspect préoccupant de tout cela est le caractère souvent hostile des phénomènes, qui rappellent d'anciennes croyances en l'existence de forces maléfiques, ou d'êtres plus ou moins malveillants, les fameux tricksters, ou joueurs de mauvais tours, que les Indiens de la région appellent des « skinwalkers ». Nous voilà plongés dans le domaine des croyances « irrationnelles », ce qui est peu courant sous la plume d'un scientifique et d'un journaliste confirmés. Mais, d'abord, quelle est la crédibilité de cette histoire ?

Le fait que l'équipe scientifique de NIDS affirme avoir observé de nombreux incidents semblables à ceux rapportés par la famille Gorman qui les avait subis avant eux pendant deux ans, donne a priori une forte crédibilité à toute l'histoire. Il y a aussi des témoignages de voisins du ranch qui renforcent les leurs. D'un autre côté, il aurait été aussi intéressant de retrouver les anciens propriétaires du ranch et de connaître leur propre histoire. Des voisins qui les avaient connus pensaient qu'ils avaient, en quelque sorte, accepté ces phénomènes et appris à vivre avec eux. Que savaient-ils ? Qu'avaient-ils appris ? On ne le sait pas. Ils avaient quitté le ranch des années avant que Gorman l'achète. Mais les Gorman ont constaté qu'ils avaient cadenassé les portes et fenêtres de leur maison. Ils avaient donc eux aussi affronté des phénomènes inquiétants ou menaçants.

Nous pouvons regretter, d'autre part, que le livre ne fournisse aucune donnée précise, scientifique, recueillie sur le ranch, telle que des enregistrements magnétiques ou même des photos des boules de lumière, ou « orbes ». En l'occurrence, il existe de nombreuses photos, fixes et sous forme de vidéos, de boules de lumière liées aux « cercles de culture », (crop circles), enregistrées principalement en Grande-Bretagne. Alors, pourquoi pas sur le ranch de NIDS, avec tous leurs équipements sophistiqués ? Les auteurs expliquent que, selon Tom Gorman, dès que NIDS est arrivé au ranch, les phénomènes sont devenus plus insaisissables, comme si l' « intelligence » cachée derrière eux était devenue plus prudente. Colm Kelleher admet cependant qu'ils ont recueilli des données, si bien que la question se pose tout de même : pourquoi ne les publient-ils pas ? Sont-elles couvertes par le secret militaire ? Il est connu que NIDS a des liens avec les militaires américains. On sait que colonel Alexander, membre important du comité scientifique de NIDS, a fait une longue carrière dans des études militaires secrètes, et il ne s'en cache pas. J'ai eu l'occasion de le rencontrer au congrès ufologique de Laughlin, dans le Nevada, au printemps 2000. Il m'a confirmé la mutilation d'un jeune veau en très peu de temps, qui est relatée dans le livre. On parlait déjà de ce cas, et je lui ai demandé s'ils allaient publier cela sur le site web de NIDS. Il m'a répondu que non, or ils l'ont fait depuis, et avec photos en couleurs ! Mais ces photos ne sont pas dans le livre, ce qui laisse l'impression d'une sorte de réticence de leur part. Manifestement, l'enquête de NIDS sur le ranch reste encore assez confidentielle, alimentant des rumeurs de secret. Le livre de Kelleher et Knapp, à cause du manque de documentation précise, ne met pas fin complètement à ces rumeurs.

La thèse centrale du livre, résumée en quelques mots, est que les phénomènes observés ne sont probablement pas dus à des « visiteurs » extraterrestres au sens classique de voyageurs interstellaires, mais à des « entités » plus mystérieuses encore, venues d'un, ou de plusieurs mondes parallèles. Tout le livre converge vers cette thèse finale, par approches successives. A mon avis, il y a des développements séduisants, mais aussi des points faibles dans leur argumentation, de sorte que leur thèse relève plus de l'opinion que d'une démonstration convaincante. Voyons quelques-uns de leurs arguments.

Les « trous de ver traversables »

Colm Kelleher et George Knapp ont consacré une partie importante de leur livre aux théories sur des « univers parallèles » et « autres dimensions », très discutées chez les physiciens. Pour eux, ce sont de telles théories qui pourraient expliquer les événements sur le ranch, notamment l'apparition d'une sorte de « porte » qui semble s'ouvrir vers un autre monde. La plus connue, celle des « trous de ver traversables » a été imaginée en 1985 par le physicien américain Kip Thorne, de Cal Tech, à la demande de son ami Carl Sagan, qui l'a utilisée dans son fameux roman Contact. Elle est fondée sur la théorie d'Einstein de la Relativité générale, et c'est une vraie spéculation scientifique faite par un physicien réputé. En quelques mots, il pourrait exister un moyen d'aller d'une partie de l'univers à une autre, ou d'un univers à un autre, parallèle, à travers un « trou » fait dans le tissu de l'espace-temps, surnommé « trou de ver », et passant à travers un « hyperespace », ou espace à quatre dimensions. C'est un concept fascinant, mais il nécessiterait une quantité colossale d'énergie « exotique » ou « négative », rien que pour le maintenir ouvert, et personne ne sait comment cela pourrait être fait, bien que ce soit un moyen standard de transport spatial dans les films de science-fiction !

Cette difficulté n'a pas découragé le physicien Eric Davis, associé à l'équipe de NIDS, qui a publié un texte de conférence donnée au symposium du Mufon de 2001, intitulé « Trous de ver et portes des étoiles : creuser des tunnels dans notre environnement cosmique » (Wormholes-Stargates : tunneling through the cosmic neighborhood ). Dans ce texte, Davis décrit audacieusement ce que pourrait être un trou de ver, et semble confiant que nous pourrions en réaliser un jour, en puisant dans une source d'énergie fantastique, surnommée l' « énergie du point zéro » ( Zero Point Energy ). Il note que, « Des plus de 650 cas enquêtés par NIDS, plusieurs dizaines impliquent des manifestations du type trou de ver », et il inclut dans la liste, sans surprise, les phénomènes observés sur le ranch de l'Utah. Eric Davis fait allusion, bien sûr, à ce phénomène étonnant de l'apparition en plein ciel d'une sorte de porte circulaire, lumineuse sur les bords, qui donne l'impression d'apercevoir un autre ciel.

Soulignons, comme les auteurs, que le ranch de NIDS n'est pas le seul endroit où aurait été vu un tel phénomène. Ceux-ci citent le cas d'une ferme près de Sedona, dans l'Arizona, une région fertile en phénomènes étranges et paranormaux. Autres exemples : selon Linda Howe, dans son livre Glimpses of Other Realities (volume 1, p. 299), « certaines personnes disent avoir vu des êtres transparents, des boules de lumière, et des êtres comme des ombres ( shadow beings ) émergeant de « déchirures » ou de « trous » dans l'air de leur chambre, ou traversant les murs, les fenêtres et d'autres objets solides ». Autre exemple, observé près d'un crop circle dans le Wiltshire. Selon Michael Hesemann, dans son livre Messages, dans la soirée du 9 juillet 1998 plusieurs témoins ont vu des hélicoptères poursuivre une boule de lumière à West Woods. Un autre témoin, le fermier Terry Butcher, d'Alton Barnes, a vu une sorte de tunnel s'ouvrir dans le ciel, comme si quelque chose de grandes dimensions passait au travers, puis le tunnel a disparu. Le jour suivant, un pictogramme a été découvert près d'Alton Barnes.

Autrement, dit, cette hypothèse de « trous de ver traversables », si l'on veut bien accorder quelque crédit à ce genre de témoignages, n'est peut-être pas aussi fantastique qu'elle paraît à première vue. Mais remarquons qu'elle n'entraine pas forcément l'hypothèse d'un passage dans un univers « parallèle ». Il pourrait s'agir d'un « simple » passage, si j'ose dire, d'un point à un autre dans notre monde.

La théorie du « multivers »

C'est ici qu'il faut faire très attention, car les auteurs prennent résolument parti pour une théorie tout à fait spéciale, celle de l'existence d'une multiplicité, voire d'un nombre infini d'univers parallèles ! C'est la théorie des univers multiples (« many worlds theory »), ou multivers , qui découle de l'autre pilier de la physique, la théorie quantique. Incidemment, cette idée de multivers a été largement promue par Jacques Vallée, qui est, justement, membre du comité scientifique de NIDS, et souvent cité par les deux auteurs.

Dans leur épilogue, Kelleher et Knapp affirment que cette théorie d'une infinité de mondes parallèles, qui fut d'abord très controversée, est maintenant approuvée par une majorité de physiciens. En fait, nombre d'autres scientifiques sont réticents vis-à-vis de cette théorie, notamment des promoteurs de la « théorie des cordes » ou « super-cordes », qui essaie de réunir les deux piliers de la physique. L'un d'eux est le jeune physicien Brian Greene, qui a écrit deux excellents livres de vulgarisation sur ces théories très difficiles, L'Univers élégant (The Elegant Universe) en 1999, et La magie du cosmos (The Fabric of the Cosmos) en 2004. Pour lui, il peut y avoir d'autres solutions, plus « économiques », pour le moins, à ce paradoxe de la physique quantique. Par exemple, la théorie de la « physique non locale » du physicien britannique David Bohm. Selon Greene, il n'y a pas actuellement de théorie favorisée par une majorité de scientifiques, et le problème reste non résolu (p. 254 de son second livre).

Il est vrai que les théories des cordes font également une place à la possibilité d'un ou de plusieurs mondes parallèles, surnommées « branes », par contraction du mot membrane. Un tel monde parallèle ne nous toucherait jamais mais pourrait être « très proche » de nous ! Il se manifesterait seulement par ses effets gravitationnels, et il pourrait expliquer le mystère de la matière manquante, ou « énergie sombre », qui est l'une des grandes énigmes de l'astronomie actuelle. Et il serait peut-être possible d'aller d'une membrane à une autre, en passant par un hyperespace à dix dimensions, appelé cette fois le « volume » (« the bulk »). Cette théorie est également controversée, mais elle paraît presque « raisonnable », comparée à celle, vertigineuse, d'une infinité d'univers parallèles, qui pourraient ne différer du nôtre que d'un iota !

Selon Brian Greene et d'autres physiciens, il y a encore d'autres développements en perspective dans ces tentatives d'unification de la physique, par exemple la « gravitation quantique à boucles » Quantum Loop Gravity »), proposée par Lee Smolin et Carlo Rovelli. D'autres théories encore sont apparues ces dernières années, si bien que la situation semble être très ouverte, et que la théorie du « multivers » est loin de faire l'unanimité, contrairement à ce que suggèrent les auteurs dans leur livre.

Eric Davis lui-même, proche de NIDS, cite une « théorie alternative de la gravitation » proposée par le physicien américain Harold Puthoff. C'est « une interprétation de la relativité générale, qui traite le vide comme un milieu polarisable » (PV, « polarizable-vacuum »). Selon Davis, ce modèle PV est « la seule théorie alternative de la gravitation qui a été utilisée avec succès pour expliquer certaines caractéristiques et performances, physiques, anti-physiques et physiologiques » rapportées dans des observations d'ovnis.

L'hypothèse extraterrestre mise en question

Ainsi, il n'est pas sûr du tout que la théorie du multivers soit la bonne pour expliquer les événements étranges observés sur le ranch de l'Utah, et autres lieux. Quoi qu'il en soit, l'autre question qui continue à nous harceler est : « qui sont les auteurs de ces étranges phénomènes, et quels sont leurs objectifs ? ». Colm Kelleher et George Knapp présentent quelques idées qui tendent toutes à écarter l'hypothèse extraterrestre, au sens « classique » du terme. Ils lui préfèrent des théories « paranormales » sur des êtres « d'outre-monde » (« otherwordly beings»), expression délibérément vague, ou des entités venant d'autres dimensions ou d'univers parallèles. Ainsi, ils nous ramènent à la vieille question : « ET ou pas ET ? ». Remarquons tout de suite que, si des extraterrestres sont capables de passer par d'autres dimensions, ou même de venir d'un autres univers, ils n'en sont pas moins des « extraterrestres » au sens large du terme. Pourquoi écarter cette idée ? Voyons brièvement leurs arguments.

Dans leur chapitre 25, intitulé « Hypothèses », les auteurs commencent par cette question : « Etaient-ce des ovnis qui volaient au dessus du ranch de l'Utah, ou était-il hanté ? », et ils passent en revue diverses hypothèses. Ils écartent rapidement les canulars, les illusions, et certains phénomènes naturels inexpliqués tels que la « théorie du stress tectonique » de Michael Persinger. Ils mentionnent l'idée d'une ancienne civilisation terrestre très avancée (qui se serait cachée quelque part), mais ils n'insistent pas, et je ne le fais pas non plus. Vient alors la grande question des extraterrestres, qu'ils présentent comme « le modèle le plus connu mais pas forcément le plus crédible pour expliquer les multiples phénomènes insolites ». Il leur semble très difficile de concevoir un « agenda » pour un groupe de visiteurs extraterrestres, qui choisiraient un lieu de visite aussi à l'écart et éloigné. Ils se réfèrent au « modèle standard » de l'hypothèse ET, des aliens volant sur des engins spatiaux en « tôles et boulons », et ils considèrent que les événements sur le ranch « ont fourni des données insuffisantes pour soutenir ou éliminer cette hypothèse », bien que certains « collent très bien avec la description standard des ovnis ». Colm Kelleher admet qu'il a vu lui-même, avec un collègue, « un objet silencieux, très rapide, venant du nord et exécutant à toute vitesse une boucle parfaite au dessus du centre de commande et de contrôle, avant de repartir vers le nord. »

Ils évaluent l'idée de « sondes intelligentes » (smart probes) envoyées par hypothèse à travers des distances interstellaires, mais ils l'écartent sur la base d'un test proposé dans les années 90 par l'ingénieur aérospatial Roy Dutton, qui a prétendu être capable de préciser l'endroit exact et la date d'apparition de tels phénomènes aériens anormaux. Et devinez quoi ? Le ranch de l'Utah a échoué au test ! Une autre conclusion pourrait être que ce test est illusoire. Un autre argument des auteurs contre l'HET est que, à ce jour, personne n'a trouvé d'artefacts – physiques ou biologiques – d'origine extraterrestre prouvée. Ils écartent aussi rapidement l'hypothèse des « anciens astronautes » qui n'est, pour eux, « soutenue par aucune donnée physique ».

A mon avis, ces arguments sont faibles. Il leur manque de considérer sérieusement la vaste quantité d'informations accumulées depuis soixante ans sur les ovnis, sur la bases desquelles a été construit un dossier fort et convaincant sur la présence, non pas d'une mais de plusieurs civilisations extraterrestres, dont certaines pourraient nous connaître depuis longtemps. Il y a de nombreuses indications sur la réalité d'engins physiques d'origine « ET », fabriqués par des civilisations non-humaines avancées. Qu'ils proviennent d'une planète située dans ce monde ou dans un monde « parallèle » ne change pas leur nature d'êtres extraterrestres réels, physiques, qui sont venus sur terre, pour quelque raison.

Des théories « paranormales » mises en avant

L'idée parcourt tout le livre que les phénomènes étranges observés sur ranch de l'Utah sont de nature « paranormale ». Les auteurs se réfèrent à beaucoup d'aspects, à commencer par les vieilles légendes indiennes telles que le mystérieux « skinwalker » . Pour les Indiens Ute, le ranch est un lieu hanté, plein d'énergies sombres et diaboliques. Pour eux, il se trouve « sur le chemin du skinwalker », une force malveillante, à éviter. Ce sont là des croyances quasi-religieuses, surnaturelles, et l'on trouve des interprétations semblables parmi certains croyants fondamentalistes, pour qui ces manifestations doivent être l'œuvre de démons. Mais les auteurs ne s'arrêtent pas là, et se tournent vers des théories « paranormales », plus récentes. Dans leur chapitre 28, intitulé « Autres dimensions », ils discutent des idées de plusieurs auteurs, principalement de Jacques Vallée son hypothèse d'un mystérieux « système de contrôle » tirant les ficelles depuis longtemps, avec des objectifs obscurs ; John Keel et sa non moins mystérieuse théorie des « ultraterrestres », quelle qu'en soit la signification ; Patrick Harpur et son intriguant concept de « Daimonic Reality » qui dérive le la croyance des anciens Grecs dans les « daïmons » ; et aussi Michael Grosso et son concept de « réalité imaginale ».

En plus de cela, dans leur chapitre 30, intitulé « Mondes intérieurs », les auteurs explorent des liens possibles entre ces phénomènes et la conscience humaine, citant Harpur, Grosso, Kenneth Ring et son étude sur les expériences proches de la mort, et ils se tournent également vers la méditation et le shamanisme. Ils mentionnent un avis du comité scientifique de NIDS sur la possible existence d'une « intelligence sensitive, précognitive et non-humaine ». Ils introduisent aussi les idées du Dr John Mack sur « d'autres dimensions et réalités », sur des « réalités alternatives », sur des « portes vers une évolution spirituelle », et sur les expériences de « mondes internes des experiencers » (mot sans équivalent en français englobant plus ou moins les « contactés » et « abductés »).

Que penser de toutes ces théories ? Il y a des pages intéressantes dans ce livre, qui nous rappellent les écrits de Jacques Vallée, lequel les a visiblement influencés. Cependant, même si je pourrais souscrire à certaines de ces idées, je reste perplexe, pour ma part, devant cette démarche générale qui semble attachée au rejet de l'HET. Ma question de base demeure : Pourquoi pas des aliens, des êtres extraterrestres ? Si de tels êtres sont capables de maîtriser d'autres dimensions et de voyager à travers elles, cela signifie-t-il qu'ils ne sont plus des êtres physiques, d'origine extraterrestre ? Et même plus, ne pourrait-il pas y avoir une coexistence entre deux sortes d'entités et de phénomènes, réels et physiques, ou « surnaturels » ? Jérôme Clark, l'un des meilleurs connaisseurs de l'ufologie, suggère cela dans un article de l'International UFO Reporter, intitulé « Le phénomène central et le phénomène secondaire » (IUR, Vol. 30, N° 4). Selon lui, nous devrions probablement éviter de mélanger ces deux sortes d' « anomalies ». Cela me semble être une bonne idée.

D'autre part, il n'est peut-être pas incongru de souligner ici, NIDS étant un organisme assez proche de l'armée, qu'il y a beaucoup de témoignages et documents convaincants prouvant l'existence d'une politique stricte de secret sur les ovnis, menée principalement par le gouvernement américain depuis la première vague de 1947, et suivie, peu ou prou, par d'autres pays. Ainsi, la thèse développée dans ce livre est fort compatible avec les positions publiques des militaires américains, qui persistent à nier l'existence même des ovnis.

Que signifient ces bruits de machines souterraines ?

Dans un autre chapitre, discutant d'une possible implication militaire, les auteurs signalent, curieusement, qu' « un médium local venu sur la propriété avait déclaré que le cercle de glace, découvert à la fin de leur séjour, avait été produit par une technologie installée sous terre ». C'est le moment de rappeler un autre aspect curieux de l'histoire. Les Gorman ont dit qu'ils avaient souvent entendu des bruits de grosses machines ou d'équipements métalliques provenant du sous-sol. Et les propriétaires précédents avaient recommandé de ne pas creuser le sol ! Rétrospectivement, il est curieux que le livre ne donne pas plus d'informations sur ces mystérieux anciens propriétaires. Ils semblaient en savoir long sur le ranch, et auraient pu aider l'étude de NIDS.

A ce sujet, de tels sons bizarres ont été entendus, selon des témoins, en d'autres lieux, tels que la vallée de San Luis. Celle-ci, située au sud du Colorado, est une autre région riche en phénomènes étranges, en particulier les ovnis, les boules de lumière, et les mutilations de bétail. C'est là qu'eut lieu le premier cas médiatisé de mutilation, celui du petit cheval Snippy (appelé en fait Lady) en 1967. Christopher O'Brien, qui a écrit un livre très intéressant sur ces événements, The Mysterious Valley (1996), cite un témoignage sur des bruits étranges, de forts bourdonnements et grondements profonds, qui ont été entendus tout près du sol, dans la zone des Great Sand Dunes (p. 185).

Pour conclure ma critique du livre, je propose un coup d'œil sur les événements qui ont eu lieu sur un autre ranch, au Colorado en 1975. Ils furent étudiés par l'APRO et plusieurs scientifiques, et ils peuvent nous ouvrir une autre perspective. L'histoire est racontée en détail dans le livre de Timothy Good Alien Contact (1993), chapitre « Percée au Colorado » (« Colorado breakthrough »). Kelleher et Knapp racontent aussi cette curieuse histoire dans leur livre. Très brièvement, les propriétaires de ce ranch ont subi des expériences effrayantes, semblables à celles du ranch de l'Utah, telles que des créatures « Bigfoot », des bruits étranges, des objets en forme de disques volant lentement devant leur maison, etc. Et des mutilations de bétail. La police locale ne voulait pas entre parler de celles-ci. Un policier leur dit qu'ils savaient ce que c'était : l'œuvre d'extraterrestres, et qu'ils ne pouvaient rien y faire ! Un soir, ils entendirent chez eux une voix parlant par le canal de leurs enceintes de télévision, disant notamment : « Attention ! Nous vous avons autorisés à rester », et leur recommandant de se taire sur ces événements. Un autre soir, ayant remarqué des lumières dans les bois, ils allèrent voir ce qui se passait. Ils y trouvèrent deux êtres d'apparence humaine, les attendant dans la lumière. Ces êtres parlèrent au témoin principal en l'appelant pas son nom et lui dirent « Comme c'est gentil d'être venu ! ». Non loin de là, il y avait un disque posé au sol. Ils s'excusèrent pour les dérangements qu'ils avaient causés et promirent « un arrangement plus équitable », qui ne vint jamais. Ils ne lui donnèrent pas vraiment d'information sur eux-mêmes et sur leur rôle, sauf peut-être une, comme l'a dit le témoin : « La seule chose que j'ai comprise avec certitude était que la grosse entité floue, le 'Bigfoot', obéit aux ordres ». Ainsi, ce « Bigfoot » serait juste une sorte de création des aliens ! Selon Timothy Good , l'opinion du propriétaire du ranch du Colorado est qu'il y a une sorte d'installation alien permanente sous le ranch. Il souligne que celui-ci offre une vue parfaite sur une installation militaire voisine, et il a le sentiment qu'ils surveillent notre potentiel militaire.

Je trouve cette histoire très intéressante, quand on considère le gros dossier ovni de surveillance des installations militaires, en particulier des bases nucléaires. Quant au ranch de l'Utah étudié par NIDS, rappelons-nous que les Gorman ont entendu plusieurs fois des bruits étranges de grosses machines qui semblaient provenir du sous-sol. Etait-ce juste un autre mauvais tour du « skinwalker », où y avait-il quelque chose de très différent ? Que se passait-il vraiment, sur et sous le ranch de NIDS ? En conclusion, je voudrais dire que ce livre de Colm Kelleher et de George Knapp est très intéressant, mais qu'il laisse le lecteur perplexe, avec beaucoup de questions sans réponses.

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