lundi 20 février 2006

Un entretien entre Jacques Vallée et Marie-Thérèse de Brosses

Résumé avec quelques commentaires, par Gildas Bourdais

C’est à l’occasion de la parution, en janvier, du nouveau livre de Jacques Vallée, un roman intitulé Stratagème (Editions de l’Archipel), qu’a été réalisé cet entretien, à la radio Ici et maintenant, entre Jacques Vallée et Marie-Thérèse de Brosses, une amie de longue date de l’auteur. C’est un long entretien de deux heures et demie, difficile à résumer brièvement, et je vais donc me limiter à en faire ressortir quelques aspects, avec mes commentaires, à l’attention de celles et ceux qui n’ont pas pu l’écouter. Il faut noter tout de suite que le roman en question n’a été abordé qu’à la fin de l’émission. Ainsi, l’entretien a consisté surtout en une revue de la longue carrière ufologique de Jacques Vallée, de ses livres et de ses idées. Après une présentation initiale de l’auteur, qualifié par Marie-Thérèse de Brosses de « plus célèbre ufologue », après avoir écrit une série de livres qui ont eu un large succès (les plus connus sont la trilogie Autres dimensions, Confrontations, et Révélations, parus en français en 1989, 1991 et 1992), elle rappelle qu’il s’est retiré du débat ufologique depuis au moins une dizaine d’années, étant en désaccord profond avec les nouvelles orientations de l’ufologie américaine, telles que les enquêtes sur Roswell et les enlèvements. Le « mémo de Pentacle » Jacques Vallée a voulu parler, en premier lieu, d’une affaire qui lui tient visiblement à cœur, encore aujourd’hui, et qu’il a baptisée le « Mémorandum de Pentacle ». Il en a parlé notamment dans son livre de mémoires, Forbidden Science (1992. v.f. : Science interdite). Sous ce nom curieux, il s’agit en fait d’une lettre de l’institut Battelle, signée par l’ingénieur Howard Cross, adressée à la commission « Blue Book » (« Livre Bleu ») de l’armée de l’Air au début de 1953. Réglons tout de suite un point de controverse. Vallée, dans cet entretien, affirme que cette lettre était adressée à la CIA, et y voit une première indication d’implication de l’institut dans des manœuvres secrètes. En fait, la lettre était adressée à un responsable des services techniques (l’ATIC) de l’armée de l’Air, sur la base de la base de Wright-Patterson, à l’attention du capitaine Edward Ruppelt, responsable de la commission d’enquête « Blue Book » ( « Livre Bleu ») sur les ovnis : « M. Miles E. Goll Box 9575 Wright-Patterson Air Force Base, Ohio A l'attention du capitaine Edward J. Ruppelt » Cette erreur de Vallée est curieuse car il ne l’avait pas faite dans son livre Science interdite. Cela dit, Vallée raconte qu’il a découvert une copie de cette lettre en rangeant les papiers de son « patron », l’astronome Allan Hynek, conseiller scientifique de la commission Blue Book. Vallée a redit qu’il avait été très choqué par cette lettre qui, selon lui, révélait une face cachée de l’ufologie américaine, à savoir des manœuvres pour cacher la vérité sur les ovnis au public, et même à la commission scientifique qui allait être réunie peu après à Washington, en janvier 1953,co-organisée par l’USAF et la CIA. Celle-ci, secrète à l’époque, est connue aujourd’hui sous le nom de « commission Robertson », et l’on sait qu’elle avait pour but de donner rapidement une caution scientifique à la politique de « debunking » des ovnis (le mot est dans ses recommandations finales). Vallée se plaint en outre d’avoir été attaqué par les ufologues américains – qu’il ne nomme pas - lorsqu’il a révélé et dénoncé cette lettre. Il s’agit principalement de l’équipe du Center for UFO Studies (Cufos), créé par Allan Hynek (décédé en 1987) qui publie l’excellente revue International UFO Reporter (IUR), et d’autres ufologues tels que Brad Sparks, qui ont en effet réfuté fermement ces allégations de Vallée. Je dois dire que j’ai trouvé pour ma part leurs arguments très pertinents, et je les ai exposés dans un étude que l’on peut lire sur Internet à cette adresse : http://home.nordnet.fr/~phuleux/jacques.htm En résumé, le Cufos a expliqué que l’institut Batelle avait écrit pour se plaindre que l’on n’attende pas la fin de l’importante étude statistique sur les dossiers d’observations d’ovnis que la commission Blue Book que lui avait confiée, sous le nom de « projet Stork ». Rappelons que cette étude a été publiée plus tard sous le nom de « Rapport 14 » de Blue Book, et reste encore aujourd’hui l’un des documents les plus solides pour attester la réalité des ovnis (Stanton Friedman ne manque jamais de la citer). On peut comprendre l’irritation de cet institut devant le peu de cas que l’on semblait faire de son étude en haut lieu. Il leur semblait aberrant de réunir une commission scientifique pour statuer sur la réalité des ovnis, sans attendre la fin de leur étude. C’est ainsi qu’il faut comprendre une phrase de la lettre que cite Vallée en dehors de son contexte : « Puisqu'une réunion est maintenant fixée de manière définitive, nous pensons qu'il est nécessaire que le projet Stork et l'ATIC arrivent à un accord concernant ce qui peut et ce qui ne peut pas être discuté lors de la réunion de Washington les 14-16 janvier au sujet de notre recommandation préliminaire à l'ATIC. » La lettre suggérait en outre que soit mis en place un programme d’observation d’ovnis dans une région propice (par exemple au Nouveau-Mexique où il y en avait beaucoup à l’époque), bien équipée, et qui serait testé en y faisant passer des engins aériens ordinaires tels qu’avions et ballons, à l’insu des observateurs. Une démarche scientifique classique, comme l’a fait observer le Cufos, et non pas un noir complot de mettre en scène de fausses apparitions d’ovnis pour tromper le public, comme semble le croire Vallée, encore aujourd’hui. Jacques Vallée a commenté ainsi, mardi soir, la polémique qu’il avait déclenchée en 1993 : « Les ufologues n’ont pas été à la hauteur. On m’a tout de suite accusé d’un tas de trucs. Tous mes livres ont été rejetés ! ». « Faux , je vous coupe ! » lui dit M.-T. de Brosses, soulignant combien ses livres ont eu, et ont encore d’influence aujourd’hui, en particulier Passport to Magonia (1969). Le titre de la version française, A la recherche des extraterrestres (publiée en 1972) est un contresens, comme l’a signalé Vallée lui-même, car c’est dans ce livre qu’il commençait à mettre en doute l’ « hypothèse extraterrestre », ou HET, selon l’expression consacrée ! J. Vallée et M.-T. de Brosses évoquent alors plusieurs de ses livres, dont Messengers of Deception (1979, v.f. en 1983 sous le titre La grande manipulation) , dans lequel Vallée a commencé à développer un autre thème qui lui est cher, celui de la manipulation par des agents de désinformation. C’est ici qu’il faut faire bien attention car, pour Vallée, il ne s’agit pas de cacher les ovnis, mais plutôt le contraire : y faire croire, par d’habiles rumeurs et mises en scène, dans le but de cacher des secrets obscurs qui sont sans doute des connaissances et des technologies très secrètes ! C’est un thème qu’il va reprendre dans pratiquement tous ses livres, et sur lequel il s’est étendu longuement mardi dernier. Rumeurs d’accidents et de contacts M.-T. de Brosses aborde la question des rumeurs d’accidents d’ovnis, et de contacts secrets avec des extraterrestres, en citant une révélation d’un ancien collaborateur bien connu de Walt Disney, Ward Kimball. Celui-ci a révélé (note : en 1979 au congrès annuel du Mufon) que l’USAF avait proposé à Disney, en 1955 ou 1956, de faire un documentaire sur les ovnis, pour lequel elle aurait fourni des prises de vues authentiques d’ovnis, mais le projet avait échoué. Elle rappelle la suite de l’histoire. Une autre proposition, faite par le canal du colonel Coleman, ancien porte-parole de Blue Book, en 1972-73 aux producteurs de cinéma Emenegger et Sandler, devait comporter non seulement des prises de vues d’ovnis, notamment d’astronautes, mais aussi sur un crash d’ovni en en 1949, avec un « alien » vivant qui serait mort en 1952, et sur une rencontre avec trois aliens à Holloman AFB en 1971. Ce second projet a été lui aussi annulé, ainsi qu’une autre proposition faite en 1983 à Linda Moulton-Howe. Puis ce fut le tour de Hynek et Vallée, sollicités par l’Air Force en 1985 pour participer à un nouveau projet de film du même genre, qui serait réalisé par Emenegger. Leur participation était une condition pour faire le film, mais ils ont refusé. M.-T. de Brosses demande à J. Vallée ce qui s’était passé. Celui-ci confirme ces divers épisodes, mais il explique pourquoi, au contraire de Linda Howe, Hynek et lui se sont beaucoup méfiés (comme il l’a déjà raconté dans son livre Révélations). Selon lui, plusieurs visites à la base de Norton en Californie, où sont conservées les archives de l’USAF, n’avairent rien donné de concret. Il se méfiait particulièrement du risque de désinformation visant à amplifier les rumeurs pour « faire croire aux gens qu’il y a des ovnis dans le ciel ». Selon lui, « c’est de la désinformation pour cacher autre chose ». Les Russes aussi font ça très bien, et il cite des rumeurs d’ovnis lancées pour cacher des lancements secrets de « satellites illégaux ». Il y a des programmes de désinformation « massifs », des expériences sociologiques… M.-T. de Brosses questionne ensuite J. Vallée sur une observation, très controversée, fait en Russie à Voronej, dont il a parlé dans son livre écrit avec Martine Castello (UFO Chronicles of the Soviet Union, 1992). Des enfants ont raconté qu’ils avaient vu des êtres de grande taille sortir brièvement d’un ovni posé au sol. Selon Vallée, l’affaire n’est pas claire, il y avait des ovnis dans la région, mais ils n’ont pas eu le temps et les moyens d’en savoir plus. (Rappelons que cette histoire a été mise en doute par Boris Chourinov dans son livre Les Ovnis en Russie ). Ce n’étaient pas des « petits gris », remarque alors M.-T. de Brosses ! En effet, répond Vallée, ils sont arrivés après, dans la foulée du livre Communion de W. Strieber. (Faut-il le rappeler aussi, Vallée n’a cessé de mettre en doute cette grande vague de récits d’enlèvements, apparue aux Etats-Unis, et dans d’autres pays, surtout à partir des années 80). Ensuite, Jacques Vallée revient encore, assez longuement, sur le « mémo de Pentacle », répétant que c’était un scandale : « On peut douter de Roswell, des documents « MJ-12 », mais, au contraire, c’était un document authentique ! ». En fait, ce n’est pas l’authenticité de la lettre qui est mise en question, c’est son interprétation par Vallée. M.-T. de Brosses souligne la piètre opinion qu’il a des ufologues, citant à cet effet un passage éloquent de son nouveau livre Stratagème, sur « ce monde de fous, de charlatans et d’illuminés… ». Elle souligne l’existence de cette « lunatic fringe », y compris en France. Vallée est bien d’accord mais ajoute qu’il y aussi des ufologues qui « font un travail admirable ». Il avait anticipé dans les années 70 l’arrivée des cultes ufologiques, tels que « Heaven’s Gate », mais les ufologues ne l’avaient pas pris au sérieux ! Il y a selon lui un phénomène de crédulité extraordinaire, un « besoin de croire aux extraterrestres » : c’est un phénomène de croyance… Or Il faut élargir l’ « hypothèse extraterrestre », c’est beaucoup plus complexe… M.-T. de Brosses renchérit sur le fossé qui s’est creusé entre les partisans du « tôle et boulonesque » et les autres. Vallée souligne que son livre Passport to Magonia avait été très mal accueilli aux Etats-Unis. M.-T. de Brosses et lui évoquent le cas de David Jacobs qui était au début un bon historien de l’ufologie mais qui est ensuite « tombé dans la marmite aux abductions, à la suite de Budd Hopkins ». Vallée explique qu’il ne peut pas se permettre d’être aussi naïf, compte tenu notamment de son activité professionnelle. M.-T. de Brosses lui demande ensuite de revenir sur sa grande théorie de la manipulation de l’humanité par une « force de contrôle ». Vallée explique de nouveau qu’il y a « une interaction profonde avec la conscience humaine » et que c’est un phénomène qui existe depuis très longtemps. Il y a cependant des aspects physiques incontestables, et tout cela remet en question nos idées en physique fondamentale. Elle lui demande ensuite de dire ce qu’il avait apporté à la réunion de Pocantico en 1997, organisée par Laurance Rockefeller et Peter Sturrock. Vallée répond qu’il y a parlé des calculs sur la luminosité, et d’études de matériaux censés provenir des ovnis. Sur ce point, il conclut ainsi : « Les analyses dont j’ai connaissance montrent des choses terrestres, en cohérence avec la configuration de ce qu’ont décrit les témoins », par exemple pour la composition de fragments métalliques. Remarquons ici que Vallée n’a pas mentionné une affaire qu’il a présentée brièvement à Pocantico, celle des débris d’Ubatuba au Brésil, qui a suscité un débat très important. Je renvoie le lecteur à mon résumé de cette curieuse histoire, à la fin de ce compte rendu. M.-T. de Brosse interroge ensuite J. Vallée sur les dossiers d’accidents d’ovnis, lui rappelant qu’il lui avait dit s’être lancé dans leur étude. Vallée répond qu’il garde l’esprit ouvert là dessus mais qu’il y a beaucoup de gens qui racontent beaucoup de choses… il s’est constitué « une petite collection d’éléments métalliques » mais il « n’y a pas encore de réponse ». Si des éléments ont été récupérés en 1947 ou en 1949, peut-être n’a-t-on pas été capable d’en tirer grand chose. En revanche, si l’on a trouvé des entités biologiques, cela aurait dû avoir des conséquences en biologie, or « ça n’a pas eu lieu ». M.-T. de Brosses lui demande son avis sur le livre du colonel Corso. Vallée l’a rencontré pendant deux jours à NIDS et dit que son manuscrit a été très déformé. Un épisode qui a été supprimé est sa rencontre avec un être non humain, avec contact télépathique… (Je confirme ce récit, divulgué depuis, notamment par le journaliste George Knapp, qui l’avait filmé bien avant son livre et a présenté la vidéo au congrès de Laughlin en mars 2000, auquel j’ai assisté). Comme à Varginha, demande M.-T. de Brosses, faisant allusion au livre du Dr Leir ? Je ne sais pas, je n’ai pas étudié ce cas, répond Vallée (c’est dommage : beau cas ce crash supposé, récent, avec témoignages crédibles sur le « cover-up » militaire. Voir par exemple le livre du Dr Leir Des Extraterrestres capturés à Varginha au Brésil, paru en 2004 en français, et en 2005 en anglais). M.-T. de Brosses lui demande ensuite de parler de NIDS, et de sa réputation de secret. Vallée explique que NIDS existe toujours mais que Robert Bigelow, son créateur, a réorienté ses activités vers l’aérospatial, et Vallée lui-même y est toujours associé. En revanche, le biologiste Colm Kelleher a quitté l’équipe scientifique. M.-T. de Brosses lui demande s’il n’y a pas un « trou noir » sur les résultats d’analyse des implants du Dr Leir. Non, répond Vallée, il y a seulement un accord de confidentialité, « rien de sinistre derrière cela… ». Il faut attendre d’avoir des résultats… M.-T. de Brosses : il n’y a donc pas encore de résultats ? Si, répond Vallée, il y a eu des études publiées sur le site de NIDS, sur les mutilations de bétail, et un livre a été publié sur l’expérience du ranch acheté dans l’Utah, où se passaient d’étranges phénomènes (c’est le livre de Colm Kelleher et George Knapp, Hunt for the Skinwalker, paru en 2005). A la demande de M.-T. de Brosses, Vallée redonne son opinion sur l’affaire de Rendlesham, qui était selon lui une « expérience de guerre psychologique ». Une indication de cela est que, des gens étaient venus dire aux radaristes de « surveiller ce qui allait venir de la mer »… Bien que j’aie lu plusieurs livres sur cette affaire complexe, je ne me souviens pas d’avoir vu cela. J’ai donné mon point de vue dans mon article « Rendlesham et le risque de désinformation », paru dans LDLN N° 370 (novembre 2003). M.-T. de Brosses finit par aborder le nouveau livre de Jacques Vallée, « Stratagème », à dix minutes de la fin de l’émission. Elle observe qu’ « un ufologue en a fait une critique très dure ». J Vallée répond qu’il « a beaucoup, de respect pour lui », mais qu’il n’a pas compris que c’est un roman , et qu’il faut « le lire entre les lignes » … Il revient sur ce thème de la manipulation pour faire croire à des histoires fausses, comme l’affaire Bennewitz (enlèvements dans la base alien de Dulce, etc.). M.-T. de Brosses est d’accord mais soulève le point très critiqué de la reprise, dans son roman, de l’histoire de Nick Redfern, publiée il y a quelques mois (Body Snatchers in the Desert), expliquant Roswell par une expérience ratée d’irradiation en vol de prisonniers chinois handicapés, qui auraient été ramenés de Mandchourie à la fin de la seconde guerre mondiale, expérience que l’on aurait cachée en répandant le rumeur de l’accident d’un ovni… A cela, Vallée répond qu’il ne faut pas la prendre au sérieux car elle est racontée, dans son roman, par un vieux médecin alcoolique… Mais il y aurait bien eu des expériences d’irradiation sur des prisonniers atteints de la progeria, et l’on doit remercier Redfern d’avoir publié des documents qui mettent en doute le crash de Roswell. Que penser de ces « révélations » ? Puisque c’est moi l’auteur de l’article, je remercie ici Vallée pour sa bonne opinion de moi, mais je renvoie tout de même à cet article, à : http://www.spica.org/articles.php?lng=fr&pg=1046 Disons seulement ici que cette histoire de prisonniers chinois handicapés provenant du centre d’expériences de guerre bactériologique japonais de Harbin en Mandchourie est tout simplement impossible : ces prisonniers avaient tous été tués par les Japonais juste avant l’arrivée des Russes en août 1945. De plus, ils utilisaient des prisonniers en bonne santé pour que leurs expériences soient valables ! Je renvoie également à la lecture de ma critique du livre de Nick Redfern, sur le site du GREPI : http://www.ovni.ch/home/frame4.htm Pour finir, Jacques Vallée explique que l’on a perdu beaucoup de temps sur Roswell. Il est sans doute tombé quelque chose, mais il n’y a aucune preuve que c’était un ovni. Ce fut une erreur de Laurance Rockefeller de suggérer au conseiller scientifique du président Clinton d’étudier le cas, en 1994. Il omet de préciser qu’il avait essayé d’en dissuader ce conseiller, à l’insu de Rockefeller. M.-T. de Brosses lui demande de citer un cas digne d’étude, mais Vallée s’y refuse, préférant une approche statistique et globale. Au risque de surprendre, je dirai que l’on peut être d’accord avec cette opinion ! Un bon exemple d’une telle approche reste l’étude de l’institut Battelle… ___________________ Annexe : Des fragments d’ovni à Ubatuba ? Gildas Bourdais (texte de 1997, avec mise à jour, février 2006) L'un des arguments inlassablement avancés par les sceptiques est que les enquêteurs n'ont jamais mis la main sur la moindre preuve matérielle d'un crash d'ovni. Mais comment le feraient-ils, si celles-ci sont supprimées au fur et à mesure qu'elles sont découvertes ? Il existe au moins un cas remarquable de débris supposés d'ovni, ceux trouvés près d'Ubatuba au Brésil, en septembre 1957. Ces débris ont été étudiés par plusieurs laboratoires au Brésil et aux États-Unis, sans que l'on puisse conclure de manière certaine sur leur nature terrestre ou extraterrestre, mais on va voir que certains aspects de l’histoire restent obscurs, encore aujourd’hui. Le 14 septembre 1957, le journaliste brésilien Ibrahim Sued reçoit une lettre à la signature illisible accompagnée de trois échantillons d'une substance d'apparence métallique. Le témoin dit avoir assisté avec des amis à l'explosion en vol, au bord de l'océan, d'une soucoupe dont les débris incandescents sont retombés dans l'eau comme un feu d'artifices, dont il a toutefois pu récupérer quelques morceaux sur la plage. Le médecin Olavo Fontes, ufologue bien connu, lit l'article du journaliste et le contacte. Aussitôt, il obtient de lui les trois fragments. Un premier fragment, l'échantillon n° 1, taillé en plusieurs morceaux, est étudié par le laboratoire des Mines du gouvernement. Plusieurs tests établissent qu'il s'agit de magnésium extrêmement pur, un premier résultat très curieux, sachant que le magnésium, corps très réactif, n'existe pas à l'état pur dans la nature et n'est jamais utilisé dans la construction de véhicules. A l'époque, l'astronome Donald Menzel, père de tous les debunkers, va supposer que c'est un fragment de météorite ; mais l'idée d'un météorite de magnésium pur est parfaitement inconcevable et personne ne se satisfait de cette explication. Résumons les points essentiels de cette longue histoire qui va passer notamment par la commission Condon. Le physicien américain Paul Hill en a donné une analyse très claire et convaincante dans un livre remarquable, Unconventional Flying Objects. A Scientific Analysis, écrit en 1975 mais publié seulement en 1995, après sa mort. Précisons que Paul Hill a fait toute sa carrière à la NASA, où il a atteint des postes de responsabilités importants. Il s'est intéressé personnellement aux ovnis après en avoir observés à deux reprises en 1952 (une grande année). Avec humour, il raconte comment il avait reçu l'instruction de se taire, par voie hiérarchique, alors qu'il était à la NACA, ancêtre de la NASA, et comment, ayant étudié les ovnis toute sa vie à titre personnel, il a écrit ce livre de réflexions sur la physique des ovnis. Il s’est intéressé à l’affaire des débris d’Ubatuba en lisant le rapport du Dr Fontes figurant un livre, paru en 1966, The Great Flying saucer Hoax de Coral Lorenzen, directrice de l’APRO avec son mari Jim Lorenzen. Les Lorenzen ont joué un rôle important dans cette histoire, Fontes étant leur correspondant au Brésil. En lisant Paul Hill, on comprend comment certaines erreurs ont permis de semer le doute. L'analyse du premier échantillon, explique-t-il, fournit un résultat étonnant. Non seulement le magnésium est d'une très grande pureté (on note seulement de faibles traces superficielles d'hydroxyde de magnésium dues sans doute à une réaction en tombant dans l'eau de mer), mais la densité (ou poids spécifique) de cet échantillon, de 1,866 g/cm3, est supérieure de 6,7 % à celle du magnésium ordinaire (1,741 g/cm3). En revanche, elle est presque exactement celle de l'isotope 26, peu abondant sur Terre, dont Paul Hill donne en détail le calcul : 1,861, soit un très faible écart, de 0,005 % seulement, explicable par la limite de précision des mesures. Selon lui, on ne peut imputer cet écart à la présence de traces d’hydroxyde de magnésium, dont la densité est de 2,36, car il en aurait fallu vraiment beaucoup. D’ailleurs, la mesure de densité avait été faite en prélevant un morceau au cœur du fragment pour éviter la contamination. Ce bout de métal, explique Paul Hill, n'a pu être obtenu que par séparation isotopique, un procédé qui n'existe à ce jour, sur Terre, que pour la séparation des isotopes de l'uranium, et avec quelle difficulté ! La suite de l'histoire devient rocambolesque. Le laboratoire, pourtant très compétent, ne songe pas à vérifier ce résultat extraordinaire sur les deux autres échantillons, et détruit le premier dans d'autres tests moins importants. Le Dr Fontes, qui possède un deuxième morceau du premier échantillon, l'a fourni au laboratoire militaire de la Marine, qui l'avait réclamé ; or celui-ci, à son tour, détruit ce morceau ! Il devient donc impossible de poursuivre l'étude de ce premier échantillon, et notamment de faire un test décisif au spectromètre de masse sur la composition isotopique. Le Dr Fontes a alors envoyé les deux autres fragments à ses collèges et amis de l’APRO, Coral et Jim Lorenzen, aux Etats-Unis. Ils ont été découpés en plusieurs morceaux, et certains ont été fournis pour analyse à des laboratoires américains. Aux Etats-Unis, la trace des échantillons devient plus difficile à suivre, explique Paul Hill. Des analyses faites aux laboratoires de Oak Ridge et de la Dow Chemical révèlent une densité proche de la normale, et un certain nombre d'impuretés, avec quand même un résultat curieux: une proportion importante d'aluminium, que l'on ne trouve pas dans les produits courants. (Il faut remarquer ici que, si ces fragments sont bien ceux d'un ovni ayant explosé, on peut supposer qu’ils proviennent de plusieurs pièces faites de matériaux différents.). Puis un fragment fourni par l'APRO à l'armée de l'Air américaine est déclaré détruit sans résultats (oh ! naïveté des premiers ufologues...).Les Lorenzen ont aussi essayé d’intéresser l’ATIC, le service technique de l’armée de l’Air, sans aucun succès. Le dernier fragment échoue, si l'on ose dire, à la commission Condon de l'université du Colorado. Il est testé dans un laboratoire du FBI, après avoir été rendu radioactif dans une pile atomique. On y trouve cette fois une proportion importante de zinc et de strontium. Or la commission Condon découvre que la compagnie Dow Chemical a testé, pendant la guerre, du magnésium très pur avec une part de strontium ; cela lui suffit pour disqualifier toute l'affaire, même s'il est impossible d'expliquer comment un tel échantillon a pu échouer au Brésil. Pour la mesure de densité faite au Brésil, l’ «explication » par la présence d’hydroxyde est adoptée sans problème. Cette affaire d’Ubatuba a provoqué une longue polémique. On ne peut évidemment exclure totalement une supercherie, d'autant plus que le premier témoin demeure introuvable (et il n'a tiré aucun bénéfice de l'histoire), mais on se demande encore comment il aurait pu se procurer un morceau de magnésium d’une aussi grande pureté. Mentionnons ici un article qui avait bien fait le point en France, en 1976 (article de Jacques Scornaux dans la revue LDLN No 158.). L’histoire d’Ubatuba ne s’arrête pas là. D’autres études ont été faites, présentées notamment dans un dossier du Journal of UFO Studies en 1992 (New Series, vol. 4), comprenant une étude faite en 1969-70 par les physiciens Walter Walker et Robert Johnson, qui n’avait pas encore été publiée. Ce dossier de 36 pages reprenait les analyses déjà faites, avec une nouvelle étude faite par le Dr Walker. En 1969, l’APRO lui a confié des fragments, et il a fait des tests non destructifs sur leur structure cristalline. Il a découvert que ce matériau avait été fabriqué selon une technique de croissance directionnelle des cristaux, qui permet d’en augmenter la solidité, technique qui faisait l’objet de recherches actives à l’époque. Cette découverte a été validée par le Dr Robert Johnson, de la Material Resarch Corporation, cosignataire de l’article. Bref, un élément bizarre de plus dans cette mystérieuse affaire. Par contre, le Dr Walker semble accepter les mesures de densité faites aux Etats-Unis. Il observe que, pour l’écart des mesures faites au Brésil, il aurait fallu, pour obtenir ce résultat, que le morceau contienne 21% d’hydroxyde de magnésium, une explication qui lui paraît concevable… Cependant, il reste ouvert, avec cette opinion personnelle à la fin de son rapport : « En résumé, après toutes ces années, je considère que le fragment de magnésium d’Ubatuba est un matériau inusité, d’origine encore inconnue » (« In summary, after all these years, I consider the Ubatuba magnesium fragment as unusual material of still unknown origin ».). Le débat a rebondi avec le livre de Paul Hill paru en 1995. C’est sur cette fameuse mesure de densité faite au Brésil que Hill se démarque complètement des analyses « officielles » faites aux Etats-Unis, comme on l’a vu, alors que même le Dr Fontes les avait plus ou moins acceptées, ainsi que le Dr Walker. En revanche, cette question de la densité va être ensuite de nouveau refermée. C’est deux ans plus tard que l’affaire est évoquée, très brièvement, par Jacques Vallée, à la fameuse réunion de Pocantico, tenue en 1997 à l’invitation de Laurance Rockefeller et animée par le physicien Peter Sturrock, professeur à l’université de Stanford. Celui-ci en a publié les communications dans son livre The UFO Enigma, paru en 1999 (publié en français en 2002 sous le titre La science face à l’énigme des ovnis). Jacques Vallée cite bien l’étude du laboratoire des Mines brésilien qui a trouvé du magnésium extrêmement pur mais, curieusement, ne mentionne pas la mesure de densité correspondant avec précision à l’isotope 26 du magnésium. Il évoque en revanche des travaux ultérieurs, dans le paragraphe suivant, cité ici intégralement : « Des travaux ultérieurs ont été conduits sous la direction de Peter Sturrock, à l’université de Stanford, et dans plusieurs laboratoires en France, incluant l’université d’Orsay, qui ont confirmé que le matériau était composé de magnésium et d’oxyde de magnésium, mais avec une quantité substantielle d’impuretés (Sturrock, 1984), principalement de l’aluminium, du calcium et du fer. L’analyse de cet échantillon continue, avec un effort pour mesurer les ratios isotopiques qui pourraient aider à établir l’origine du matériau. » (texte original ci-après). Ensuite, il signale que la date de l’incident n’est pas certaine : peut-être a-t-il eu lieu en 1933 ou 1934, lorsqu’un bolide s’était écrasé près d’Ubatuba ! Voici encore un curieux développement, cette fois sur le forum « UFO Updates ». L’ufologue canadien Nick Balaskas a révélé le 6 avril 1999 que le Dr Peter Sturrock avait confié en 1997 un morceau de l’un de ces échantillons au Dr Sam Wang, de Vancouver au Canada, pour en déterminer les ratios isotopiques. Selon Balaskas , « les résultats de ce test ont montré que l’isotope 24 du magnésium (qui constitue environ 80% du magnésium terrestre) était pratiquement absent du morceau d’Ubatuba qui avait été testé ». D’autres tests étaient envisagés. J’ai essayé d’obtenir confirmation de cette nouvelle assez sensationnelle, directement auprès du Dr Sturrock, avec qui j’avais déjà correspondu l’année précédente pour lui fournir des éléments sur Trans-en-Provence. Dans un message du 15 mai 1999, je lui ai rappelé les analyses de densité, telles que publiées dans le Journal of UFO Studies en 1992, et dans le livre de Paul Hill en 1995, et je lui ai demandé s’il pouvait me confirmer l’information donnée par Nick Balaskas. Sa réponse a été d’une remarquable brièveté : « Les résultats ‘anormaux’ sont suspects et demandent à être répétés. Je ne revendiquerais pas, à l’heure actuelle, qu’ils prouvent une anomalie isotopique.» (« The ‘anomalous’ results are suspect and need to be repeated. I would not claim any evidence of an isotopics anomaly at this time ».) Les derniers fragments encore disponibles d’Ubatuba (on ne sait plus très bien lesquels, et d’où ils viennent) ont-ils fait l’objet d’une autre analyse ? Je n’en ai pas entendu parler. En revanche, il se trouve que j’ai obtenu un document très intéressant, une copie intégrale de la longue lettre écrite par le Dr Olavo Fontes à Coral Lorenzen, datée du 27 février 1958. Cette lettre devait rester confidentielle mais elle a été retrouvée dans les archives de l’APRO, par quelqu’un qui n’a pas été nommé. Il n’est pas très difficile, cependant, d’en imaginer l’identité, sachant que Bill Moore a révélé en 1989 au congrès du Mufon qu’il avait espionné l’APRO, dont il était membre du comité directeur dans les années 80, pour le compte des militaires de l’AFOSI. Il est peut-être opportun de rappeler ici que l’APRO avait été désigné nommément comme un organisme à surveiller, dans le rapport de la commission Robertson de janvier 1953, secret à l’époque, mais publié en 1969, en Annexe du rapport Condon ! Dans cette lettre, le Dr Fontes racontait comment il avait eu à plusieurs reprises la visite d’officiers de la marine brésilienne qui avaient lourdement insisté pour qu’il leur remette les débris d’Ubatuba en sa possession. Devant le refus de Fontes, ils lui avaient alors fait des révélations sur les secrets ovni, dans le but de lui faire saisir l’importance de l’affaire. J’ai pour ma part publié des extraits significatifs de cette lettre dans mon livre « Ovnis. La levée progressive du secret ». On y apprend notamment qu’il y avait eu plusieurs ovnis accidentés (déjà en 1957 !), et qu’il y avait eu des tentatives d’interception par la chasse américaine, lesquelles avaient toutes échoué, certains appareils étant même abattus, au point que ces tentatives avaient été arrêtées. Il est probable que cette piste d’informations et de révélations est définitivement close, étant donné que le Dr Fontes est mort de cancer en 1968, âgé seulement de 43 ans. Jim Lorenzen est décédé en 1986, Coral en 1988, et les archives de l’APRO semblent être inaccessibles aujourd’hui. ______________________ Extrait du texte original de la présentation de Jacques Vallée à Pocantico (The UFO Enigma, p. 239) : “Subsequent work under the direction of Peter Sturrock has been conducted at Stanford University and at various laboratories in France, including Orsay University, confirming that the material was magnesium and magnesium oxide, but with substantial impurities (Sturrock, 1984), primarily aluminum, calcium, and iron. Analysis of this sample is still ongoing, with an effort to measure isotopic ratios that might help establish the origin of the material (Lorin and Havette, 1986). The date of this event, often quoted in the literature as 1957, is actually imprecise. Dr. Pierre Kaufmann of São Paulo believes the original incident took place in 1933 or 1934, when a bolide indeed passed over Ubatuba and crashed at a nearby beach. The only aerial event to occur at or near Ubatuba in 1957 was the crash of a DC-3.”

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jeudi 26 janvier 2006

Un livre de Jacques Vallée : "Stratagème"

Un nouveau livre de Jacques Vallée : " Stratagème " Note de lecture par Gildas Bourdais

Un nouveau livre de Jacques Vallée est toujours un événement pour les ufologues francophones. Il est à présent disponible en librairie, sous le titre " Stratagème " (aux Editions de L'Archipel) et se présente comme un roman, que l'on trouvera, non pas au rayon habituel d'ésotérisme, mais au rayon de science-fiction. Mais peu importe car, si dans ce " roman ", Vallée nous conte une curieuse histoire, c'est bien d'un livre sur les ovnis qu'il s'agit, comme on va le voir, et c'est à ce titre qu'il convient de l'évaluer. Autant le dire tout de suite, mon opinion est que, sous couvert d'une histoire romancée, ce livre est une caricature insidieuse de l'ufologie, ressassant de nombreux arguments qui relèvent de la désinformation, dont le plus récent est l'histoire absurde de Nick Redfern sur Roswell.

Le plus simple est de suivre l'histoire. Robert, le narrateur, est directeur des relations extérieures dans un entreprise d'informatique de la " Silicon Valley ", dirigée par son ami Mark Harris, qui s'apprête à lancer un nouveau semi-conducteur performant. L'entreprise est vulnérable, comme beaucoup depuis l'éclatement de la bulle boursière, mais elle est soutenue par un partenaire influent de Mark, le banquier George Preston, qui " a su convaincre le fonds Goldenstar de mettre quelques millions sur la table ". On va découvrir plus loin que c'est un aspect important de l'histoire. Notons au passage que Jacques Vallée connaît bien ce milieu d'affaires, étant lui-même promoteur de " start-ups " d'informatique à San Francisco.

Mark Harris invite Robert à faire une petite croisière à l'embouchure de l'Amazone, près de l'île de Colares. Il faut rappeler que celle-ci est au coeur d'une région qui a connu des événements dramatiques dans les années 70. De pauvres pêcheurs y ont été agressés par des ovnis, certains y ont perdu la vie, et l'armée brésilienne y a fait une enquête approfondie, sur laquelle elle a commencé à donner des informations en 2005, justement. A bord du bateau, une violente tempête surprend la nuit nos vacanciers innocents. Ils voient surgir des flots deux ovnis gigantesques et illuminés - 500 mètres de long, précise Robert ! - qui font d'énormes vagues et provoquent leur naufrage. Ils sont repêchés en piteux état, mais le fils de Mark, Ricky, a péri dans le naufrage. Mark, très affecté et impressionné, se lance dans une enquête sur les ovnis pour savoir ce que cachent les autorités. Il a cependant un atout, la caméra électronique de son fils, contenant des photos de l'ovni et qu'il a retrouvée miraculeusement sur la plage. De retour à San Francisco, Mark raconte à Robert que l'ambassadeur américain est venu le voir à l'hôpital de Fortaleza où il récupérait, puis un " type des renseignements " est venu pour mettre la main sur la caméra ! Ainsi, le lecteur est-il plongé dès le début du livre dans une ambiance de manipulation et de conspiration du style " ils savent tout et nous cachent tout ".

Mark Harris obtient un entretien à Washington avec le sénateur de Californie Healdsburg, et y va avec Robert. Lors de l'entretien, le sénateur est assisté de Stéphanie Sheldon, et deux autres personnages sont présents : le professeur Barley, " conseiller scientifique de la commission des forces armées ", qui va écouter leur histoire avec réticence, sans rien dire, et un certain monsieur Boterman, dont la fonction n'est pas précisée. Le sénateur Healdsburg et son assistante racontent qu'ils ont eu connaissance d'enquêtes antérieures sur les ovnis, mais que ça n'avait pas abouti. Le sénateur cite un effort de Laurance Rockefeller pour inciter le conseiller scientifique du Président Clinton à enquêter sur le crash de Roswell, et le mystérieux Monsieur Boterman raconte alors qu'il avait justement participé à cette initiative. Il avait bien appelé un général au Pentagone " qui s'occupait des archives ", mais celui-ci lui avait dit " d'aller chier dans son chapeau " ! (page 51). Il s'agit en fait d'une réplique qui aurait été faite à un enquêteur du GAO, lorsque cet organisme du Congrès avait commencé son enquête sur Roswell. Faisons un petit détour dans le monde réel pour signaler que, justement, Jacques Vallée avait été associé par Laurance Rockefeller à son effort pour intéresser la Maison Blanche aux ovnis, dans son groupe " Human Potential Foundation ". Des réunions avaient lieu avec le conseiller scientifique de Bill Clinton, le Dr Jack Gibbons. Au printemps de 1994, alors que le GAO venait de commencer son enquête sur Roswell pour le compte du Congrès, Rockefeller avait réussi à intéresser Gibbons à cette affaire. Nous savons maintenant, grâce au chercheur Grant Cameron qui a obtenu communication des archives, que deux membres du groupe de Rockefeller, en désaccord avec cette initiative, avaient alors quitté le groupe. L'un d'eux n'était autre que Jacques Vallée, lequel avait écrit directement au Dr Gibbons pour solliciter un entretien, que celui-ci avait d'ailleurs refusé ! (Son fax, du 14 février 1994, a été publié par un autre enquêteur, Steven Kaeser, du très sérieux Fund for UFO Research, ou Fufor). Cette démarche de Vallée pour bloquer une enquête sur Roswell s'est avérée inutile, en fait, car le Dr Gibbons avait rapidement abandonné ce projet, sur avis négatif du Pentagone. Ceci est bien raconté par François Parmentier dans son livre "OVNI. 60 ans de désinformation" (pp 200 et 201).

A la sortie de cette curieuse réunion, c'est l'assistante du sénateur, Stéphanie Sheldon, qui les rattrape dans le couloir et leur propose de dîner ensemble pour leur en dire plus. " Vous entrez dans un domaine dangereux, où vous ne connaissez pas tous les obstacles " leur explique-t-elle (sur ce point, je suis d'accord !). Les informations qui circulent sont faussées par " l'action de gens qui se cachent derrière différents groupes et n'hésitent pas à infiltrer les organisations d'amateurs pour exploiter leurs fantasmes ". Elle leur raconte alors comment le malheureux ingénieur Paul Bennewitz s'était fait bourrer le crâne par des agents de l'armée de l'Air avec de sombres histoires d'enlèvements par des extraterrestres opérant dans une base souterraine où ils fabriquent des hybrides, bref, " toute une série de légendes que le pauvre physicien, puis les ufologues du monde entier, ont rapidement adoptée ". Mais pourquoi donc avait-on lancé toutes ces folles rumeurs, demandent Mark et Robert à l'assistante du sénateur. Elle leur explique alors que c'était pour cacher des expériences secrètes de radio-communications sur la base de Kirtland, près d'Albuquerque, que Bennewitz avait découvertes en écoutant des émissions radio de la base, depuis son laboratoire d'électronique situé à proximité. Mais ce bon tour des services secrets a eu un effet pervers, poursuit-elle : "les secrets techniques des militaires étaient sauvegardés, mais une véritable psychose de l'invasion extraterrestre était née ".

Qu'en est-il de cette histoire, dans le monde réel ? Oui, il y a eu désinformation de Bennewitz, pour lui faire perdre la raison, avec l'histoire fantaisiste de la base souterraine de Dulce au Nouveau-Mexique. Cet objectif a été " brillamment " atteint dans les années 80, avec l'aide de l'ufologue Bill Moore, embauché secrètement à cette occasion, qui l'a avoué au congrès du Mufon en 1989 devant un public indigné. Et il est vrai que Bennewitz, en racontant partout cette fable de Dulce, a fortement contribué au lancement des rumeurs conspirationnistes les plus folles qui se sont répandues à cette époque (voir à ce sujet mon livre " OVNIS : la levée progressive du secret "). Mais nous avons là l'explication classique des sceptiques, qui ne cessent de dénoncer ces rumeurs en faisant l'amalgame avec les recherches de pointe qui progressaient beaucoup à l'époque, notamment sur des dossiers comme Roswell,les enlèvements, les mutilations de bétail. Il est évident que cette nouvelle ufologie inquiétait beaucoup les militaires, et il n'est pas surprenant qu'ils aient alors utilisé la technique de la " désinformation amplifiante " pour la discréditer. C'est là la véritable explication de la triste affaire Bennewitz. Et ce n'est pas un hasard s'ils ont " embauché " secrètement Bill Moore, peu après la parution de son livre sur Roswell en 1980. En réalité, si Bennewitz avait seulement découvert des expériences secrètes de radio-communications, il aurait été beaucoup plus simple de lui dire de se taire, d'autant que c'était un bon citoyen qui avait informé les militaires de ses observations. Ainsi, le roman de Vallée s'aligne tout simplement sur la version sceptique de cette histoire, comme il l'avait déjà fait dans son livre " Révélations ". Soulignons aussi combien il est méprisant pour les ufologues. Cette opinion condescendante est depuis longtemps une constante chez Vallée, et elle parcourt tout le livre. Par exemple à la page 68, où Mark se débat avec des milliers de sites sur Internet où s'étale " ce monde de fous, de charlatans et d'illuminés ", qui se livrent à " des attaques fratricides et des accusations virulentes contre les gouvernements qui dissimulaient des certitudes cosmiques ".

Reprenons l'histoire. Mark et Robert sont ensuite contactés par le général Crawford, qui a été informé de leur histoire par le sénateur Healdsburg. Le brave général essaie de leur faire croire qu'ils ont vu des dirigeables militaires brésiliens, mais nos deux héros ne sont pas contents du tout et le lui font savoir sans ménagement. Là, nous sommes encore au camp de base de la désinformation, mais le roman va bientôt se corser. Etape suivante : la femme de Mark tente de se suicider, bouleversée car on est venu mettre à sac la chambre de son fils pour retrouver la caméra contenant les précieuses photos des ovnis. Il y a toujours, en effet, ces photos sur la petite carte mémoire, qu'il faut analyser. C'est le père de Robert, expert émérite, qui va le faire dans des conditions idéales de discrétion, renouant avec lui pour la circonstance après deux ans de brouille. Au bout de deux heures d'analyse, le verdict tombe : les photos sont remarquables mais " impossibles " car les ovnis changent de forme ! Cependant, le père, qui possède deux doctorats, n'est pas troublé et fait allusion à d'autres dimensions, prévues par la théorie des cordes. Pourquoi va-t-on chercher la vie dans l'espace, observe-t-il, alors qu'elle est peut-être sous nos yeux, dans une autre dimension ? Il raconte à Robert qu'il a lui aussi essayé d'intéresser le conseiller scientifique de la Maison Blanche à ces idées, mais " ...il nous a ri au nez. On ne peut pas lui en vouloir : il n'avait pas accès au secret de niveau élevé " (Décidément il y a plein de gens au courant, mais pas le conseiller scientifique du président !) Et les médias ne s'intéressaient qu'aux " intégristes de la soucoupe ", ajoute-t-il (p. 79).

Puis le " complot " s'épaissit encore. Sur la route du retour à San Francisco, les deux amis échappent de justesse à une tentative d'assassinat. Blessés, ils sont recueillis et soignés discrètement par de sympathiques marginaux dans le petit port de Banderas Bay. Ils y rencontrent quand même un colonel à la retraite qui leur apprend qu'il avait été contrôleur de budgets noirs au Pentagone. Ils avaient bien repéré des études non identifiées à très gros budget - des milliards de dollars - et on leur avait juste dit que c'était pour étudier du " matériel extraterrestre ". Son chef avait appris qu'ils " analysaient des objets volants inconnus, sans grand succès ", mais il avait renoncé à en savoir plus après avoir été menacé de " perdre deux étoiles " ! Notons au passage que Robert ne pense pas à prévenir son père, qui a gardé copie des photos, du danger qu'il court sans doute lui aussi, mais ne chipotons pas. C'est alors que leur vient l'idée géniale - c'est le " stratagème " - de mettre en scène une fausse apparition de soucoupe, qu'ils font faire se poser près d'un village du Middle West en laissant quelques traces, dans l'espoir de débusquer des agents secrets venus enquêter. L'histoire de cette mise en scène est bien peu crédible, avec une fausse soucoupe, vite fabriquée en plastique, suspendue de nuit à une grue près du village, mais ces braves gens sont si bêtes qu'ils n'y voient qu'un ovni !

Accélérons le film. L'affaire fait aussitôt grand bruit et tout le monde vient voir. La radio de " Mike Ball " (allusion probable à la célèbre radio de Art Bell) en fait tout un plat, avec l'invitée du jour qui révèle que l'archange Gabriel lui avait annoncé l'atterrissage " sur l'oreiller " (encore un coup sur le nez des ufologues). Au village, nos héros repèrent facilement des agents secrets dans la foule excitée, en les voyant s'emparer d'un appareil de leur fabrication, qu'ils ont laissé astucieusement sur le lieu de l'atterrissage. Il contient un émetteur ultra-sophistiqué (fabrication ad hoc, vite faite, de leur laboratoire) qui va leur permettre de les suivre à la trace. Ils les suivent ainsi en voiture jusque dans un trou perdu de l'Arkansas, Cherokee Flats, où les agents secrets s'enfoncent, non loin de là, dans une mine désaffectée. Nos enquêteurs malins les suivent et finissent par découvrir, au bout de longs couloirs, une salle où des scientifiques essaient d'étudier un débris d'ovni extraordinaire, auquel ils ne comprennent rien, bien entendu. Comme l'ovni géant de Colares, cette pièce semble elle aussi changer de forme, et faire sans doute la navette dans une autre dimension. Elle émet une mystérieuse radiation qui leur donne une terrible migraine et les rend malades. Repérés, ils battent en retraite. A la sortie de la mine, un hélicoptère surgit et des hommes en armes embarquent Mark. Robert réussit à s'échapper et revient au village voisin, où il découvre que tout le monde est malade et dégénéré, à cause de l'influence délétère du débris. Néanmoins il y fait une nouvelle découverte, de grande importance. Dans un bar, un vieux médecin alcoolique qui l'a repéré, le docteur Matt, l'emmène dans une chambre froide - c'est dans l'arrière boutique de la maison des pompes funèbres - où il conserve une douzaine de cadavres dans des caissons. Il en ouvre un, et devinez quoi : c'est l'un des petits Chinois handicapés, sur lesquels on a fait d'inavouables expériences d'irradiation en vol, à White Sands, en 1947. C'est l'histoire du livre de Nick Redfern sur Roswell, " Body Snatchers in the Desert ", paru en juin 2005 !

Le vieux médecin avait fait partie de l'équipe et lui raconte son histoire, qui est un résumé du livre de Redfern. Il faut signaler que celui-ci a fait un beau scandale l'année dernière aux Etats-Unis et dans le monde, tellement l'histoire est absurde. En deux mots, ces prisonniers auraient été trouvés en 1945 par les Américains à l'Unité 731 (centre d'expérimentations biologiques en Mandchourie, où ils n'ont pas pu mettre les pieds, le territoire ayant été "libéré" par les Russes), et les auraient rapatriés, avec des médecins japonais, pour mener en 1947 ces horribles expériences d'irradiation en vol, suspendus à des ballons. Mais il y a eu des accidents, poursuit le vieil ivrogne, et les légendes de crash d'ovni à Roswell et autres lieux ont été fabriquées par les services secrets (il y a participé) pour cacher à tout jamais ces expériences inavouables. Le hic, c'est que plusieurs informateurs ont raconté l'histoire à Nick Redfern en comptant sur lui, manifestement, pour la répandre, ce qu'il a fait. Et voici que le roman de Vallée recycle l'histoire, en quelque sorte ! J'ai participé à la critique de ce livre de Redfern, sur Internet, et avec un article que l'on peut lire à cette adresse : http://www.ovni.ch/home/frame4.htm Ceux qui n'ont pas le temps de le lire trouveront un court résumé des quelques arguments à la fin de cette note de lecture. Pour information, mon article a été publié en anglais dans le "Mufon UFO Journal" de novembre 2005, et la revue " IUR ", du Cufos, en a publié aussi une critique, de l'excellent ufologue Robert Durant.

Soulignons tout de même une contradiction flagrante dans cette histoire. Dans la version de Redfern, toute trace de ces sinistres expériences avait été effacée, ce qui n'a pas empêché des informateurs, membres de services secrets, de la lui raconter, et le film de l'autopsie de sortir sur toutes les télévisions en 1995, montrant, selon eux, l'un de ces prisonniers handicapés ! On trouve chez Vallée une contradiction analogue : que diable font ces cadavres dans un trou perdu de l'Arkansas, conservés par un vieux médecin alcoolique, et comment se fait-il qu'il ne soient même pas gardés ? Si, ils sont gardés par un jeune employé qui " semblait affecté par ce que les psychologues appellent pudiquement un déficit intellectuel ", nous précise Vallée ! (p. 193). Comme le médecin a oublié le code d'ouverture de la porte, il demande à cet idiot du village, qui l'a notée sur un papier dans sa poche, de le lui composer. Impressionnante démonstration d'efficacité pour des opérations ultra-secrètes qui ont coûté on ne sait combien de millions de dollars !

Là dessus, la course folle de notre héros n'est pas terminée. Deux malabars débarquent dans le café, visiblement à sa recherche, et il faut fuir au plus vite. Hélas, ils ont fait exploser sa voiture, mais un miracle se produit alors : un taxi jaune fait irruption, avec à son bord une belle fille aux yeux verts qui le sauve in extremis ! Abrégeons encore la folle histoire. Robert suit à la trace un agent facile à repérer, aux cheveux coupés en brosse et au blouson de cuir. Celui-ci prend l'avion jusqu'à Paris, et là, le train pour Bruxelles. Pourquoi pas l'avion direct jusqu'à Bruxelles ? Peut-être pour brouiller les pistes, mais c'est raté. Robert ne le lâche pas d'une semelle. Ils arrivent enfin au but : c'est le siège de la plus puissante banque privée du monde, qui s'avère être l'investisseur de la société de Mark Harris, par le canal du " Goldenstar Investment Funds ". Et ce n'est pas un hasard ! Il était attendu, et il y retrouve Mark. On leur dévoile alors tout un monde secret, très " conspirationniste ". La banque s'intéresse beaucoup aux ovnis car c'est un facteur de risque pour ses investissements mondiaux. Ils ont même un laboratoire secret, qu'on leur fait visiter, où ils étudient un autre fragment d'ovni aux propriétés magiques, comme celui de la mine dans l'Arkansas. Sans grand succès, leur avoue-t-on : c'est un leitmotiv du roman. Le mystérieux débris leur donne de nouveau mal à la tête et il faut abréger la visite. On apprend aussi que ces débris d'ovni ont été repêchés en 1953 par un sous-marin britannique dans le Pacifique : je crains qu'ils n'aient eu très mal à la tête pendant leur voyage de retour ! Pourquoi ce débris a-t-il été passé par la Marine de Sa Majesté à une banque privée ? Peut-être, justement, parce qu'il leur donnait mal à la tête !

Jacques Vallée nous sert, avec ces stupéfiantes révélations, une chronologie de l'histoire des ovnis à sa façon, qui vaut encore un " arrêt sur image ". Il nous ressort notamment sa vieille histoire du " mémo de Pentacle ", réfutée depuis longtemps par les meilleurs ufologues américains, l'équipe du Cufos créée par l'astronome Allen Hynek. J'ai déjà expliqué cela en détail dans un article publié dans la revue " LDLN " (No 361, juillet 2001), et visible sur Internet (site " Triangle " de Philippe Huleux). En quelques mots, il s'agit d'une lettre de 1952, écrite par l'ingénieur Howard Cross, de l'Institut Battelle, au capitaine Ruppelt, responsable de la commission " Livre Bleu ". Ruppelt avait commandé à cet institut réputé une analyse statistique des observations d'ovnis. A l'automne 1952, Cross avait appris qu'une réunion scientifique se préparait, qui allait être la fameuse " commission Robertson ", en janvier 1953 à Washington. Or l'étude de Battelle (qui allait devenir l'excellent " Rapport 14 " de Livre Bleu) n'était pas terminée, et Cross déplorait dans sa lettre que l'on n'ait pas attendu leurs conclusions pour faire cette réunion. Critique pertinente ! Il suggérait aussi que l'on fasse une expérience, avec des instruments de mesure ad-hoc, dans une zone riche en observations d'ovnis, par exemple au Nouveau Mexique, pour tenter d'enregistrer des ovnis, et en y faisant aussi voler incognito des avions et des ballons pour calibrer les instruments. Vallée a découvert dans les années 60 une copie de cette lettre dans le bureau de Hynek, dont il était alors l'assistant, et il en a en a tiré un véritable roman, en 1992, dans son livre " Forbidden Science " (en français, " La science interdite ", 1997), croyant y voir la preuve que l'on avait fait des expériences secrètes de mise en scène de faux ovnis. Et si ces expériences ont bien eu lieu, a spéculé Vallée, elles ont peut-être été à l'origine de beaucoup d'observations d'ovnis ! On voit ici un thème qui rejoint celui de l'historien de la CIA Gerald Haines - les avions secrets qu'on a pris pour des ovnis, et l'on a favorisé cette croyance pour les protéger - thème récurrent dans ces deux livres de Redfern et Vallée : les fausses histoires de crash d'ovni pour camoufler des expériences secrètes, l'ingénieur Bennewitz désinformé, etc. En bref, selon ces auteurs, il faut comprendre que, oui, on nous cache des choses, mais pas des ovnis : des expériences secrètes, évidemment ! On apprend aussi, dans le roman de Vallée, que les militaires américains confient leurs études sur les ovnis à des sociétés privées pour ne pas être embêtés par des enquêtes indiscrètes (p. 227). En fait, ce n'est pas vraiment un scoop, car il y a des années qu'on en parle. N'oublions pas que, de toutes façons, ils n'y comprennent pas grand chose, nous dit Vallée !

Mais alors, que sont ces ovnis géants qui sortent de l'eau à Colares, et ces débris étranges qui donnent mal à la tête ? Vallée a ménagé une porte de sortie spectaculaire pour conclure. Les puissants financiers de Bruxelles emmènent notre héros, qui est maintenant leur prisonnier comme son ami Mark car ils en savent trop, pour une nouvelle croisière dans l'embouchure de l'Amazone, car ils veulent tout savoir sur cette histoire. Leur superbe bateau est pris à son tour dans une violente tempête, provoquée par l'irruption d'un ovni géant qui émerge des eaux, venant sans doute d'une autre dimension. Le bateau fait naufrage, noyant presque tout l'équipage, mais Robert est sauvé in extremis. Devinez par qui : par la fille aux yeux verts, qui est sortie de l'ovni ! Mieux encore, elle ramène le jeune fils de Mark que l'on croyait mort, en fait sauvé par l'ovni, et tout finit bien. Quelle est sa vraie nature ? Vallée laisse planer le mystère.

Que penser de cette histoire ? Qu'elle risque de passer encore la rampe auprès d'un public francophone où Vallée a conservé pas mal d'adeptes. Espérons cependant que certains, qui s'interrogent plus ou moins sur le rôle obscur qu'il semble jouer, vont ouvrir les yeux. Il est triste de voir un tel auteur, qui avait si bien commencé sa carrière ufologique, en arriver aujourd'hui à raconter une telle fable, propageant des thèmes bien identifiés de la désinformation américaine, sous couvert d'une ouvre de fiction. _______________________ Quelques arguments sur l'histoire de Nick Redfern. (publiés par moi en anglais sur la liste UFO Updates, début décembre 2005).

Je voudrais résumer ici quelques arguments contre le livre de Nick Redfern " Body Snatchers in the Desert ". Le principal est celui que je considère comme un défaut majeur (en fait, le défaut " fatal ") de son histoire : plusieurs informateurs indépendants lui ont dit que des prisonniers handicapés (des Chinois pour la plupart) avaient été ramenés de Mandchourie. C'est impossible, comme le révèlent les livres d'histoire. Les Russes avaient envahi la Mandchourie en moins de deux semaines, et les Japonais avaient tué tous les prisonniers restants, avant leur arrivée. De plus, ils utilisaient des sujets en bonne santé pour leurs expériences. Le deuxième argument majeur est que des débris de ballons et d'avion auraient été facilement identifiés comme tels par les officiers de l'Air Force de Roswell. Il n'y aurait pas eu de communiqué de presse. Et si, toutefois, ils avaient commis une aussi incroyable méprise, des témoins comme Jesse Marcel, le général DuBose et d'autres, n'en auraient pas été fiers et n'auraient pas voulu en reparler trente ans plus tard, très probablement. Un autre point important, qui a été en fait le premier débattu à UFO Updates (par Bob Shell et d'autres), est l'argument du film de l'autopsie d'un " alien " qui, selon ses informateurs à Londres, montrait un prisonnier chinois handicapé ! Ses informateurs avaient mentionné les syndromes de la progeria, de Werner et de Ellis van-Creweld. Quand j'ai raconté cette histoire en France et en Italie, les gens ont bien ri. Un autre point, également important, est que si cette " vérité horrible " était la chose à cacher " à tout prix ", pourquoi plusieurs informateurs la lui avaient-ils racontée, en premier lieu ? C'est absurde, évidemment. Au contraire, cela a un sens de supposer que, de même que certaines fausses histoires de crash ont pu être " plantées " pour cacher le vrai crash de Roswell (et peut-être d'autres), la partie continue avec cette nouvelle histoire. De même, si cette histoire était vraie, il aurait été tellement plus facile pour l'Air Force de la rendre enfin publique, surtout après les révélations de la commission ACHRE sur les expériences d'irradiation humaine, au lieu de s'accrocher à une histoire impossible de ballons Mogul, et de mannequins pour essais de parachutes.

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